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26/05/2024
A mortal binding
MY DYING BRIDE
 
Il y a des groupes qui accompagnent toute une vie. Me concernant, MY DYING BRIDE fait partie de la cohorte sombre qui, toujours, a concilié la brutalité du Death Metal, la lourdeur et la lenteur du Doom Metal, les tourments du Rock gothique. Certes, leurs compatriotes de PARADISE LOST les ont précédé de deux ans et ont en quelque sorte imposé les canons du Doom Death Metal. En 1992, alors même que PARADISE LOST sortait progressivement de sa première période extrémiste avec l’album Shades Of God, MY DYING BRIDE accouchait de son premier opus, As The Flower Withers. Soit une déclaration en faveur des penchants les plus torturés et désespérés de l’âme humaine, tels que permis par les moyens puissants des années 90, largement emprunts des tourments romantiques morbides du XIXième siècle. En 1987, CANDLEMASS incarnait à jamais le Doom métaphysiquement désespéré avec le titre Solitude. En 1990 et 1991, PARADISE LOST clouait définitivement le cercueil, quitte à recourir ponctuellement à un chant féminin. D’entrée de jeu, MY DYING BRIDE eut la volonté de dépasser ces schémas, encore récents à l’époque, notamment en convoquant instruments à cordes et à vent. L’album essentiel Turn Loose The Swans (1993) poursuivit avec génie cette veine gothique. Après quoi, MY DYING BRIDE allait consacrer deux albums à consolider sa posture Doom Death (The Angel And The Dark River, 1995, et Like Gods Of The Sun, 1996). Le conformisme guettant, le groupe se lança pleinement dans l’expérimentation avec le superbe 34.788%... Complete, récoltant des louanges (trop rares), une volée de reproches de la part des traditionnalistes.

Ces derniers se trouvèrent récompensés par le surpuissant The Light At The End Of The World (1999). Depuis, le groupe aligne des albums de Doom Death allant du fringant au fort correct. L’innovation se trouve désormais reléguée à des projets clairement spécifiés, à l’instar du magnifique mais totalement incompris Evinta (2011). Faisant suite au vibrant The Ghost Of Orion (2020), A Mortal Binding délivre son lot de compositions parfaitement conformes au cahier des charges du Doom Death Metal gothique : lenteur, lourdeur, le tout délivré avec puissance et clarté, un violon déchirant entrelacé avec des riffs âpres et singulièrement bien dessinés. Le chant d’Aaron STAINTHORPE alterne avec facilité et efficacité entre un registre clair et nasal, se voulant ostensiblement doloriste, et des démonstrations caverneuses et rauques, porteuses d’une agressivité venimeuse.

Pour l’essentiel, A Mortal Binding s’inscrit dans la lignée des albums récents - solides, palpitants, torturés – avec son lot de titres longs et tortueux. Pas moins de trois compositions s’annoncent entre sept et neuf minutes, The Apocalyptist (He Did Not Weep for Me) dominant l’ensemble du haut de ses onze et quelques minutes. Pour autant, une fois passée son introduction typiquement Doom, le morceau inaugural de l’album, Her Dominion, recèle des riffs étonnamment rêches et saccadés, alors même que les vocaux se font anormalement aigres et venimeux. Comme quoi, même après des décennies de pratique d’un Metal extrême, MY DYING BRIDE trouve, fusse fugacement, à se montrer sous des angles inédits.

Presqu’un quart de siècle après sa création, MY DYING BRIDE demeure encore et toujours une valeur sure en matière de Metal lent, lourd et dépressif, ce qui représente un challenge en soi. On aimerait une prise de risque plus franche, mais on sait que celle-ci entraînerait un hiatus dans une popularité déjà très circonscrite. Alors, contentons-nous – et c’est déjà énorme – de déprimer une fois de plus

Vidéos de The 2nd Of Three Bells cliquez ici et Thornwyck Hymn cliquez ici
Alain
Date de publication : dimanche 26 mai 2024