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19/06/2013
Traveller
JORN
 
Les trois dernières années, le vocaliste norvégien Jorn LANDE a eu du pain sur la planche. Entre un hommage en 2010 un peu raté à son idole Ronnie James DIO, un album en semi-teinte (Bring Heavy Rock To The Land – 2012), un album symphonique (début 2013) reprenant certains de ses titres solo et deux compositions de DIO en version orchestrale, il refait à nouveau surface en ce mois de juin avec un 10ème opus dans la droite lignée de ses précédentes réalisations. Bien sûr, certains diront que le heavy rock du chanteur scandinave est insipide, inégal et basique, sans originalité. Mais, même s’il n’arrive pas à rivaliser avec les plus grosses pointures du genre, JORN sait apporter de la pêche avec des compositions directes, dépourvues d’artifices inutiles, il faut bien le reconnaître.

Donc, cette nouvelle sortie n’apporte quasiment rien de neuf à sa discographie, quoique... Elle fait bien pâle figure face au puissant Nova Initium de MASTERPLAN, l’ancien groupe de Jorn, même si les deux formations n’évoluent pas forcément dans le même style musical. Néanmoins, j’ai pris beaucoup de bon temps à l’écoute des 10 titres de ce Traveller. D’ailleurs, dès le morceau d’ouverture, l’excellent Overload, nous pouvons ressentir la volonté de LANDE d’en découdre avec ses détracteurs et de prouver son grand retour. Puisant tantôt son inspiration chez DIO pour les "killers riffs", tantôt chez MASTERPLAN pour les plans rythmiques plus complexes, le groupe privilégie la simplicité et nous délivre de bonnes chansons dépourvues de froufrous inutiles. Jorn et ses compères vont droit au but. Comme le confirment les brûlots que sont Traveller, Legend Man ou Window Maker, par exemple. Les autres titres ne sont pas en reste, ceci notamment grâce au travail réalisé par Trond HOLTER, le nouveau guitariste, qui a officié, entre autres, au sein de WIG WAM. Cette collaboration entre scandinaves a permis d’apporter de la fraîcheur au heavy rock teinté de metal de JORN, ce qui n’est pas un mal lorsqu’on sait le nombre de disques rayés qu’a sorti notre lascar de piaf norvégien… Mais, laissons le passé au passé. JORN ne fait plus vraiment dans la redite. Du moins, pas en ce qui concerne les ambiances (Carry The Black et ses passages fantomatiques, dignes d’un Vincent Price de DEEP PURPLE) ou les quelques expérimentations vocales. Au niveau des influences, par contre, cela pêche beaucoup. On se croirait par moment sur des disques de DIO (les couplets de Make Your Engine Scream ou les breaks de Cancer Demon, semblables à ceux de Holy Diver de DIO, Traveller) ou sur les rondelles de BLACK SABBATH à certains moments (The Man Who Was King). Le reste emprunte à un metal plus moderne (Rev On, Monsoon). L’ensemble demeure, toutefois, loin des reproches que nous pouvions faire à JORN il y a encore peu. Et ce n’est pas la mascotte (l’homme-corbeau) créée par l’illustrateur espagnol Felipe Machado FRANCO et présente sur la plupart des pochettes qui va prouver le contraire et porter malheur à nos cinq musiciens.

Nous avons, par conséquent, à faire ici à un disque très prenant, mêlant les diverses facettes du répertoire de JORN dans une mixture plutôt digeste, au final. Ce qui est une agréable surprise, tant pour les fans que pour les médias. Traveller ne révolutionnera pas le genre, mais il apportera beaucoup de plaisir aux auditeurs. La production réalisée par Jorn LANDE et Trond HOLTER, ainsi que le travail de mixage et de "mastering" de Tommy HANSEN, sont pour beaucoup dans ce résultat flamboyant. A contrario, il serait sûrement bon pour Jorn LANDE de ne pas se laisser aller à la facilité et de continuer sur la lancée de l’expérimentation sans pour autant sombrer dans le progressif pur jus. Mais, un peu moins de guitares, un peu plus de claviers et d’ambiances futuristes permettraient de relancer la machine JORN et, par voie de fait, la carrière du chanteur. Espérons que le prochain album fasse plus de place à la créativité et à une musique plus futuriste. Pour le moment, je vous invite à vous installer confortablement dans votre canapé, et à vous enivrer de cette galette généreusement garnie, si vous vous l’êtes déjà procurée, bourrée de bons morceaux autant que peut l’être une gourmande crêpe végane au tofu et quinoa ("boudiou", ça me donne faim tout ça !). Jorn a, sans aucun doute, encore de beaux jours devant lui en tant qu’un des leaders de la scène metal européenne, Traveller étant une bien belle réalisation que toute personne appréciant le timbre de voix unique rond et chaleureux du norvégien, comme l’était celui de Ronnie James DIO (RIP), se doit de posséder dans sa discothèque.
神の知恵
Date de publication : mercredi 19 juin 2013