19 / 20
28/12/2013
Last patrol
MONSTER MAGNET
 
MONSTER MAGNET est l'entité électrique, le véhicule déglingué qu'a créé Dave WYNDORF pour s'exprimer. Cette incarnation a produit des merveilles de Hard psychédélique pur et dur (Spine Of God en 1991 et Superjudge en 1993) ainsi qu'un pur chef d’œuvre, certes plus accessible mais totalement jouissif : Dopes To Infinity (1995). Après quoi, Dave WYNDORF a entraîné son entité vers un Hard Rock plus formaté, plus carré, certes très maîtrisé et puissant mais parfois à la limite de l’auto parodie. D'où une collection d'albums chromés, remuants mais exempts d'un certain esprit d'aventure. Certes, MONSTER MAGNET avait dégraissé son Hard Rock pour le ramener vers quelque chose de plus sale, proche dans l'esprit des STOOGES et du MC5 (4-Way Diablo en 2007 et Mastermind en 2010) mais la magie n'opérait qu'à moitié.

Last Patrol constitue indéniablement un retour en majesté. Certes, le gros Rock bien énervé est toujours présent : écoutez Hallelujah et essayez de ne pas taper du pied ! De même que le pillonage rythmique du morceau Last Patrol n'exclue pas un groove démoniaque. Mais le Hard psychédélique fait son grand retour, avec tout ce que cela implique de sinuosité, de grandeur, de structures déjantées, d'ambiances glauques, de couleurs vraiment très spéciales.

D'ailleurs, WYNDORF ne s'y est pas trompé puisqu'il ouvre cet album de la rédemption par le programmatique I Live Behind The Stars : le genre de composition qui démarre sur un tempo rampant, avec un plan hypnotique et qui monte en pression vers les étoiles. The Duke Of Supernature est une sorte de ballade tendue et menaçante, avec chant trafiqué, grosses pulsations de la basse et claviers vintage obsédants en arrière plan. Plus dépouillée, la ballade Stay Tuned montre que, même sans effets, le chant rauque et sardonique de WYNDORF véhicule des émotions poignantes, un peu comme le jeune Iggy POP savait si bien le faire. Enfin, WYNDORF et sa bande offrent un lifting lourd et épais à la charmante ballade orientalisante Three Kingfishers du chanteur folk DONOVAN (initialement parue en 1966 sur l'album Sunshine Superman).

Un titre comme Mindless Ones représente une synthèse fantastique entre l'efficacité imparable du Hard et les tourbillons psychédéliques. De même que l'urgence qu'irradie End Of Time invite à emprunter la planche du Surfer d'argent : magistral et épique !

Sur l'édition spéciale, MONSTER MAGNET livre deux titres supplémentaires : le trépidant, cinglant, énervé et direct Strobe Light Beatdown, et One Dead Moon qui débute délicatement sur le mode guitare acoustique et voix avant d'exploser sur un groove titanesque, le schéma se reproduisant plusieurs fois. Deux titres d'excellente facture qui justifient une édition spéciale.

MONSTER MAGNET a amplement réussi son coup avec un album qui atteint presque les sommets de Dopes To Infinity. C'est le genre d'album puissant, varié, où la mise en son sert parfaitement des compositions fortes, servies par des musiciens à la fois maîtres de leur sujet et portés par un feeling authentique. Last Patrol vous propose un voyage spatial traversé d'orages électriques : aurez-vous l'audace de le tenter ?
Alain
Date de publication : samedi 28 décembre 2013