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01/04/2015
Ecate
UFOMAMMUT
 
Il est des noms de groupes qui font office de programme, qui annoncent la couleur sans ambages, qui permettent à l'auditeur potentiel de s'engager en toute connaissance de cause. En se baptisant UFOMAMMUT à la fin des années 90, nos voisins transalpins affichaient sans vergogne une volonté de fusionner la lourdeur du Doom, l'épaisseur du Stoner mais aussi les circonvolutions opiacées ou lysergiques propres au Rock psychédélique et au Space Rock cher à HAWKWIND. Sans se soucier des modes, des étiquettes ou des tendances, UFOMAMMUT a fièrement aligné des albums puissants, dérangeants et intransigeants. Au point d'obtenir une cooptation prestigieuse au début des années 2000 avec la signature sur le label Neurot recordings, maison exigeante sur le plan qualitatif fondée par les pionniers de NEUROSIS. Dans cette écurie, UFOMAMMUT a d'ores et déjà publié le dyptique Oro (Opus Primum et Opus Alter, tous deux parus en 2012). Ecate vient enfoncer le clou.

Les fidèles ne risquent aucune mauvaise surprise, assurés qu'ils sont de retrouver ce magma rythmique extrêmement épais, définitivement lourd mais paradoxalement animé par des mouvements dynamiques inattendus. Je ne parle pas là d'accélérations du tempo puisque celui-ci demeure globalement lent. Non, je pointe davantage le rôle essentiel joué par la section rythmique. Il y a tout d'abord cette basse au son titanesque, tout en vibrations malsaines, en saturations abrasives. C'est bien simple, le jeu du bassiste Urlo fait passer les œuvres complètes de Lemmy et Geezer BUTLER pour de l'accompagnement feutré de Lounge Music !!! A titre d'exemples, écoutez les monstrueux Temple et Somnium et vous comprendrez à quel type de travaux de terrassement je fais allusion...
Sans compter que le bougre est fort intelligemment appuyé par son collègue batteur Vita qui, tout en prenant soin de marquer sèchement le tempo, met en place des contretemps malins et un jeu de cymbales opportun qui créent des mouvements ondulatoires au sein du magma.
Du coup, les guitares de Poia peuvent se faire rêches, crépitantes et acides au possible : le riff d'introduction de Daemons en témoigne amplement. Et surtout, il reste de l'espace aux nombreux effets planants et hypnotiques qui valident la dimension Space et psychédélique. En permanence à l'arrière-plan, ça bruisse, ça chuinte, ça frémit, ça stridule. Cet aspect très typé années 70 prend le dessus en introduction de Somnium et occupe la totalité du superbe instrumental Revelation, tout cela me rappelant les premiers albums de TANGERINE DREAM ou les débuts de Klaus SCHULZE. Dans ces instants, la sensation d'écrasement recule au profit d'une dimension plus méditative, quoique lardée d'effets angoissants.
Avec tout cela, le spectre sonore est quasiment plein. De fait, le chant, plus ou moins clair ou colérique, est systématiquement mixé en retrait, ajoutant juste au chaos ambiant.

Si j'ajoute que UFOMAMMUT privilégie comme de bien entendu les formats longs (quatre compositions sur six s'échelonnent entre sept et onze minutes), vous comprendrez que Ecate ne s'adresse qu'aux amateurs de puissance tellurique à l'état brut, qu'aux voyageurs de l'extrême.
Alain
Date de publication : mercredi 1 avril 2015