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31/08/2016
Infinite entanglement
BLAZE BAYLEY
 
Vous pouvez dire tout ce que vous voulez sur Blaze BAYLEY, l’ancien vocaliste de la Vierge de Fer et toujours frontman de WOLFSBANE, il est au moins une qualité que personne ne peut remettre en cause chez lui : son courage. Depuis son éviction de la bande à Steve HARRIS, à cause notamment de ses problèmes d’allergie aux produits utilisés pour les effets pyrotechniques, Blaze a dû faire face à de nombreuses épreuves plus ou moins surmontables, dont la plus douloureuse a été le décès de sa femme et manager, Debbie HARTLAND, au mois de septembre 2008, qu’il a subie alors que sa carrière venait tout juste de redémarrer après qu’il ait dissous le second line-up de son groupe post-IRON MAIDEN et qu’il se soit finalement lancé réellement dans un projet solo. Ce coup porté à son petit cœur a renforcé sa détermination à rendre hommage à son âme sœur en poursuivant sa voie musicale, ce qui a été aussi salutaire pour lui car le metal a été une véritable thérapie qui lui a permis d’apaiser sa souffrance et de retrouver une certaine joie de vivre. Quand bien même l’on peut ressentir toute la géhenne de Blaze, dont le chant est très tortueux, sur son troisième opus King Of Metal (2012), en particulier sur One More Step, une balade crève-cœur qui ouvre mes canaux lacrymaux à chaque fois que je pose une oreille dessus. Rien que les paroles de cette chanson vous prennent aux tripes, alors imaginez qu’avec ce texte vous avez littéralement la chair de poule quand les notes jouées au piano mettent en exergue la puissance des sentiments de son auteur et compositeur quand il expulse vocalement tout ce qu’il a enduré durant une trop longue période de sa Vie.

Aujourd’hui, Blaze est sorti complètement revigoré de toutes ses expériences négatives, dont il a pu tirer des leçons positives et prend désormais son existence d’une manière beaucoup plus spirituelle qu’auparavant. Même si quatre longues années ont passé depuis la sortie de son précédent album, il faut avouer que ce break lui a fait du bien et l’a lancé sur une route inattendue à la fois pour lui et pour nous. Loin de ses précédentes réalisations, son dernier né, Infinite Entanglement, n’a plus grand chose à voir avec les Silicon Messiah, Blood And Belief ou The Man Who Would Not Die, dans le sens où cette nouvelle galette n’est plus aussi directe et fougueuse. Blaze a mûri grâce à ses nombreuses expériences de Vie et cela se ressent ici. Le ton, bien que parfois nostalgique, se veut beaucoup plus lumineux. Blaze BAYLEY a, pour la seconde fois en 16 ans, réussi à composer un album très solide et, surtout, plus optimiste. Peut-être parce qu’il s’agit de la première partie d’une trilogie basée sur une idée du vocaliste, fan de SF, qui devrait aussi sortir sous forme de roman très prochainement. Le fait de pouvoir enfin mêler ses deux passions (la musique et la science-fiction) en une seule et même entité discographique a boosté le britannique qui se sent désormais pousser des ailes. Et cela fait vraiment plaisir de le voir aussi souriant, comme peuvent en témoigner les spectateurs qui se sont récemment rendus à ses concerts français.

Infinite Entanglement (ou ‘Infini Enchevêtrement’) qui fait référence à l’interconnexion universelle entre tous les êtres vivants dans l’Univers, est une sortie particulièrement intéressante non seulement musicalement, mais aussi et surtout conceptuellement. Avec la complexité du sujet abordé, on comprend mieux pourquoi le sympathique natif de Birmingham a mis autant de temps à mettre en place cet ambitieux projet. Maîtriser tous les aspects de la physique générale, de la physique quantique et de la spiritualité, n’est pas donné à tout le monde et cela demande du temps d’assimiler cette manne d’informations essentielles à l’intellection du fonctionnement cosmique et de son Soi. C’est ainsi que ce désormais quatrième album n’a vu le jour que le 18 mars dernier. Par ailleurs, il était vital pour Blaze de renouveler son équipe de musiciens afin de retrouver l’énergie et la fraîcheur de ses débuts avec BLAZE, sa première formation post-MAIDEN. Je n’affirmerai pas que Infinite Entanglement est un nouveau Silicon Messiah car cela n’est absolument pas le cas. Par contre, je peux avancer sans me planter qu’il contient certains éléments présents sur le millésime 2000 du vocaliste, comme les touches « maideniennes », la fluidité des rythmiques, les soli de grattes et quelques ambiances mystiques comme sur Ghost In The Machine ou Identity, End Dream ou Tenth Dimension, histoire de faire le lien entre son passé et son présent, dans l’optique de se créer un avenir.

D’ailleurs, de futur et d’identité il en est question sur Infinite Entanglement. Le questionnement intérieur et la recherche de Soi sont des composantes essentielles qui font intégralement partie de la personnalité absconse du chanteur, qui a, comme à son habitude, retranscrit ses émotions et ses interrogations verbalement pour nous transmettre un message et écrire une nouvelle page de son existence. Concrètement, Infinite Entanglement nous conte l’histoire d’un homme qui voit sa vie bouleversée le jour où il se rend compte qu’il peut vivre plus d’un millénaire et que, suite à cette découverte « empoisonnée », il est contraint d’accepter une mission qui le mènera dans l’espace. Durant son périple en solitaire, beaucoup de questions se bousculeront alors. Est-il un homme ou une machine ? Quel sens doit-il donner à sa Vie ? Quel intérêt y a-t-il à vivre plus longtemps que le reste de l’Humanité si c’est pour connaître la solitude ? Telles sont les thématiques philosophiques abordées sur cette dernière offrande de l’anglais originaire des Midlands.

Pour mettre en œuvre ce chantier quasi-pharaonique, il s’est entouré de personnes de confiance et de musiciens de session pour l’accompagner durant l’enregistrement de Infinite Entanglement, qui reprend là où s’est arrêté BLAZE avec Tenth Dimension. Ce crû 2016 est, donc, la continuation logique de la dynamique lancée au début des années 2000, après une relativement longue traversée du désert, et c’est très bien comme ça. Car Infinite Entanglement dénote une sérénité retrouvée et un regain d’énergie positive que le sujet de la Reine Elizabeth II souhaite nous transmettre généreusement. Et cet environnement de travail renouvelé a permis à Blaze de créer une œuvre qualitativement satisfaisante, donc plaisante. Ainsi que de se constituer une fine équipe d’instrumentistes talentueux en les personnes de Chris APPLETON (guitares), Karl SCHRAMM (basse) et Martin McKNEE (batterie), définitivement intégrés dans la formation. D’ailleurs, c’est Chris qui s’est principalement chargé des compos et de la production. Et le résultat est là : des titres tout à la fois heavy et mélodiques, un son puissant et clair. Le tout transpire la simplicité et la franchise. Ce qui n’est que le reflet de la personnalité de Blaze BAYLEY, un homme amical et droit dans ses bottes, toujours accessible et souriant. Il n’est, donc, pas étonnant de voir que ce nouvel album soit à l’image du chanteur, c’est à dire divertissant, rayonnant et rafraîchissant. Un véritable bol d’air musical. Qui change réellement de toutes les sorties actuelles qui manquent affreusement d’âme. Il n’y a qu’à jeter une oreille sur la balade What Will Come pour se rendre compte de la profondeur des sentiments avec laquelle le vocaliste inonde littéralement son interprétation. Cependant, il met également tout son cœur dans le reste des chansons, principalement Human, Calling You Home, Independence et A Work Of Anger. Et l’intensité émotionnelle du survivant est soutenue par les ambiances cinématographiques, les passages contés ainsi que les voix féminines semi-lyriques qui parsèment l’ensemble et donnent de la cohérence, de la consistance et de la continuité à ce disque fort élégant.

Blaze BAYLEY a eu la très bonne idée de se lancer dans une trilogie musicale qui pourrait être largement transposée sur grand écran. Infinite Entanglement est une excellente entrée en matière qui nous présente les personnages, la trame principale et le décor général aussi précisément que l’épisode IV de la saga Star Wars. Tel un story-board qui défilerait devant nos yeux, mettant en scène les différents acteurs, l’opus s’égraine rapidement et se découpe en plusieurs mouvements bien distincts qui prennent littéralement vie si tant est que l’on fasse marcher son imagination. S’ouvre alors devant nous un univers onirique vivement coloré et très personnel, toutefois très proche de ceux des grandes figures littéraires de la science-fiction comme Asimov (le cycle de ‘La Fondation’), Bradbury (‘Chroniques Martiennes’) ou Herbert (‘Dune’) ou, plus récemment, de ceux conçus par Arjen Anthony LUCASSEN pour les enregistrements de sa formation principale AYREON (Into The Electric Castle, The Universal Migrator, Part I & II, Ayreonauts Only, 01011001). Loin de se complaire dans le basique et le déjà-entendu, Blaze s’est posé là un véritable défi qu’il a relevé avec brio. Peu de monde peut se targuer d’avoir un sens de la création aussi florissant, les gens ne faisant pas forcément fonctionner leur créativité ou, plus exactement, ne sachant pas comment l’activer alors que ce processus est d’une facilité déconcertante, une fois les pensées polluantes écartées de son esprit. Ainsi, nous découvrons avec plaisir et surprise d’autres facettes du britannique : après celles de chanteur et de compositeur se dévoilent celles de « romancier », de « scénariste » et de « réalisateur », qui complètent à la perfection sa panoplie de musicien et d’artiste. Cela dit, même si l’histoire racontée ici peut sembler un peu complexe, SF oblige, le courageux anglais ne s’est pas laissé aller à des humeurs progressives. Son genre préféré étant le heavy metal, Blaze ne s’est pas détourné d’un iota de son style fétiche, ceci afin de ne pas embrouiller ses fans et de rester fidèle à ses convictions musicales qui lui ont apporté une certaine renommée à travers le monde. C’est tout à son honneur et c’est parce-que je sais que vous pourriez apprécier ce « blockbuster » audio que je pourrais qualifier, en quelque sorte, d’opéra-metal, que je vous invite à l’acheter et à l’effeuiller avant que ne sorte le prochain volume, probablement en 2017, à moins que vous ne l’ayez déjà chez vous sur une étagère. Dans ce cas, jetez-y vous dessus, vous ne le regretterez pas.

Line-up :

Blaze BAYLEY (chant)
Chris APPLETON (guitares)
Karl SCHRAMM (basse)
Martin McKNEE (batterie)

Equipe technique :

Blaze BAYLEY (production)
Chris APPLETON (coproduction)
Bob CHEEL (prise de son, mixage)
Miguel SECO (prise de son, mixage, mastering)
Andreas SANDBERG (artwork, design du livret)

Guests :

Michelle SCIAROTTA (guitares acoustiques, chœurs, narration)
Thomas ZWIJSEN (guitare acoustique sur « What Will Come »)
Anne BAKKER (violon sur « What Will Come »)
Emily PEMBRIDGE (claviers, piano)
Liz OWEN (chœurs)
Joanne ROBINSON (chœurs)
Mel ADAMS (chœurs)
Anne BREWER (narration)
Rob TOOGOOD (narration)
James DUNN (narration)

Tracklist :

1) Infinite Entanglement
2) A Thousand Years
3) Human
4) What Will Come
5) Stars Are Burning
6) Solar Wind
7) The Dreams Of William Black
8) Calling You Home
9) Dark Energy 256
10) Independance
11) A Work Of Anger

Date de sortie :

18 mars 2016

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神の知恵
Date de publication : mercredi 31 août 2016