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03/05/2017
Heathen hymns
GALLEY BEGGAR
 
Vers la fin des années 60 et durant la décennie 70, les musiques Folk connurent une renaissance flamboyante. On se souvient de la vague des musiques celtiques mais on oublie trop souvent que le Royaume-Uni connut une effervescence remarquable d'où émergèrent des formations brillantes comme PENTANGLE, FAIRPORT CONVENTION, STEELEYE SPAN, LINDISFARNE, TREES, INCREDIBLE STRING BAND... Loin de se résoudre à un purisme sectaire, ces folkeux injectèrent à des doses diverses des éléments externes : Jazz, Rock progressif, Rock psychédélique, musiques indiennes (on pense notamment à QUINTESSENCE et THIRD EAR BAND)... Et puis, la vague s'en est allée, avec quelques ressacs ponctuels. C'est à l'écart de tout courant ou effet de mode que cette formation britannique a démarré sa carrière discographique en 2010 avec l'album Reformation House, suivi en 2012 par Galley Beggar et en 2014 par Silence & Tears.

Encore plus que précédemment, Heathen Hymns révèle la parfaite maîtrise des fondations Folk mais aussi le refus net quoique subtil de n'être qu'une chambre d'écho, qu'une reconstitution d'un passé glorieux. GALLEY BEGGAR ne conçoit son Folk que rehaussé par des arrangements plus acides, voire orientaux. Si le recours à des instruments traditionnels sert de trame aux compositions (guitare acoustique, violon, percussions...), notons en premier lieu que GALLEY BEGGAR met en œuvre une véritable section rythmique basse-batterie qui ponctue avec pondération mais qui épaissit et anime une instrumentation qui pourrait paraître fluette. D'ailleurs, sur le morceau Four Birds, ce duo rythmique développe des motifs relevant presque du Drum'n'Bass, avec un résultat qui pourrait figurer au répertoire actuel de Robert PLANT, au même titre que Moon And Tide.

J'ai évoqué la présence d'un violon, manié par la violoniste Celine MARSHALL, dont il ne faut pas croire qu'il déverse les sempiternelles jigs et autres airs à danser. Non, ce serait trop simple, trop évident. Ce violon peut créer des nappes brumeuses, des langueurs lancinantes, mais peut à l'occasion émettre des sons dissonants et acides, à l'unisson de guitares porteuses d'un psychédélisme réminiscent de la scène Folk Rock californienne de la fin des 60's (le long solo bluesy, chancelant et progressif, de The Girl I Left Behind n'aurait-il pas pu être signé par Stephen STILLS ou Jorma KAUKONEN ?).
Un sitar se faufile au sein du titre The Lake, au côté du violon grave et solennel, la beauté de cette composition étant complétée par des chœurs alliant féminin et masculin. Même une belle ballade mélancolique classiquement structurée comme Lorelei n'est pas exempte d'une grosse basse ronde et de stridulations guitaristiques.

On a beaucoup parlé d'instrumentation, reste à évoquer le chant féminin de Maria O'DONNELL, modulant paisiblement entre registres médium et grave, avec quelques pointes plus hautes. Surtout, son timbre profond porte sans ostentation une capacité à exprimer un sens dramatique utile pour faner toute tentation trop solaire. Loin des clichés, la musique de GALLEY BEGGAR accompagne fort bien la pluie et la brume, les ambiances sont souvent intenses, voire pesantes (Let No Man Steal Your Thyme).

GALLEY BEGGAR vient de produire un album au parfum entêtant et subtil, apte à attirer des fans de Rock ouverts d'esprit, cherchant une musique passionnée quoique ne misant pas majoritairement sur le règne impérieux de l'électricité.

Vidéo de Moon And Tide : cliquez ici
Alain
Date de publication : mercredi 3 mai 2017