17 / 20
07/12/2019
Studio albums 1984-2013
VULCAIN
 
Ne mentez pas ! Noël approche et vous ne savez toujours pas quoi offrir : 1° au tonton vieillissant qui vous brise les noix avec l'âge d'or du Hard dans les années 80 ; 2° à l'adolescent qui découvre le Rock sous haute tension ; 3° à l'encyclopédiste du Rock made in France ; 4° à vous-même, au titre du certificat de hardos pur jus dans les années 80. Dans les quatre cas de figures cités ci-avant, nous avons une solution à votre angoisse existentielle : l'intégrale des albums studio du groupe VULCAIN, tour à tour trio et quatuor, entre les bornes temporelles mentionnées dans le titre de ce coffret. Soit la totalité de la production discographique de VULCAIN, moins les trois albums en public (Live Force, paru en 1987, Atomic Live en 1996 et En Revenant... en 2011) et le tout dernier album studio, Vinyle (2018). Ce qui nous laisse tout de même pas moins de huit albums studios, disponibles dans un coffret à prix modique. Certes, le coffret décevra les fétichistes : pas de livret regorgeant de visuels et d'anecdotes, pas de titres inédits (tout juste les trois titres du maxi La Dame De Fer, logiquement adjoints à l'album inaugural Rock'n'Roll Secours), pas de goodies, pas de code de téléchargement, on s'arrête là merci !

Car enfin, de quoi, ou plutôt de qui s'agit-il ? De VULCAIN, combo francilien formé en 1981, biberonné aux décibels gras de GRAND FUNK RAILROAD et surtout de MOTÖRHEAD. Revenons donc au tout début , soit la coagulation d'envies et d'inspirations, incarnée par Daniel PUZIO (chant et guitare), Vincent PUZIO (basse), Didier LOHEZIC (guitare) et Franck VILATTE (batterie). Après trois démos et une apparition sur une compilation du label britannique Ebony, le groupe signe chez Devil's records et publie un premier opus pour le moins séminal, Rock'n'Roll Secours : pour l'essentiel, il s'agit d'une ré-appropriation de la formule Rock'n'Roll maximaliste tout juste popularisée par MOTÖRHEAD. La production est certes critiquable, très live mais un brin confuse. Pour autant, quel shot de puissance et de passion !!! Foncièrement sympathique quoiqu'anecdotique, l'adaptation a capella du morceau paillard et traditionnel La Digue Du Cul s'inscrit de manière impérative dans le répertoire populaire du groupe. En attendant, les brûlots se nomment Rock'n'Roll Secours, Ebony, Le King, Pile Ou Face, Overdose et Bosser. Mention spéciale à mon titre préféré, plus chargé en émotion contenue : Les Damnés.

Ne nous méprenons pas, ce premier opus particulièrement infusé dans la chope de bière de Lemmy demeure un condensé de Rock ultime (si vous préférez de Hard Rock maximal). D'où une réelle
difficulté à concevoir une suite logique. Marquant les débuts du batteur Marc VAREZ, Desperados envoie des signaux qui se veulent complémentaires : demeurent présents les morceaux rugueux (Blueberry Blues, Fuck The Police, Le Verre de Trop...), auxquels s'adjoignent deux tentatives de Hard Blues brut (Si Tu Bats De L'Aile, Richard). Mieux produit que son virulent prédécesseur, Desperados témoigne d'un équilibre entre l'énergie viscérale et une maîtrise plus professionnelle.

Fortement marqué par la présence accrue du manager et producteur Elie BENALI, le troisième opus, Big Brothers, accentue encore davantage la diversification, avec un résultat mitigé. S'ils sont toujours présents comme garants de l'identité fondamentale de VULCAIN, les morceaux rapides et féroces (Les Plaisirs Solitaires, Grand Prix) n'étonnent plus, tout en demeurant furieusement efficaces et prenants. Les mid-tempos bien carrés (22, Khadafi, Faire Du Rock, Le Soviet Suprême) dominent, combinant une sévérité rythmique et des arrangements plus mélodique. D'une manière générale, on sent que le producteur a cherché à doter VULCAIN d'un son plus Rock, un peu vain : difficile d'imaginer un public Rock généraliste succomber aux vocaux toujours aussi rugueux ! La fort vivace reprise de On Nous Cache Tout On Nous Dit Rien de Jacques DUTRONC s'avère convaincante, tout en donnant l'impression que VULCAIN ne peut pas complètement se fier à son propre répertoire. Par contre, cette volonté de diversification offre un Blues Rock poisseux on ne peut plus crédible (Drôle De Jeux), au même titre que le plus connu Jeudi 19 Juin, hommage au comique Coluche, rehaussé de cuivres et d'un harmonica.
Big Brothers est un album qui révèle le potentiel d'un groupe à la croisée des chemins, entre amours du Hard Rock viscéralement féroce et diversification.

A l'aube de la décennie 90, VULCAIN n'hésite pas à poursuivre sa mue et à proposer Transition, un album qui surprend son public, suscite une certaine incompréhension et qui, pourtant, me paraît demeurer encore aujourd'hui l'un de ses meilleurs. Explications. Exit le guitariste rythmique Didier LOHEZIC, bienvenu au guitariste soliste Frank PILANT. Eléments constitutifs de l'identité première du groupe, les compositions rapides sonnent plus affûtées que jamais (Derrière Les Cartes en ouverture !). Par contre, VULCAIN assume avec panache une tendance Big Rock à la VAN HALEN, rendue possible et crédible par une production rutilante, à la fois puissante et limpide. En fer de lance de cette tendance, on trouve un titre emblématique, Sophie (cliquez ici), monumental dans sa construction et dans ses arrangements : alternance de gros riffs propulsés sur un tempo vivace, de passages plus mélodiques, texte prenant, chant expressif et modulé de Daniel PUZIO, Sophie demeure pour moi une merveille. Les interventions acérées et funambulesques de Frank PILANT contribuent à la dynamique d'ensemble, n'opposant aucune contradiction flagrante avec l'ADN du combo. Hélas, le public fut dérouté et Frank PILANT quitta l'aventure...

… remplacé par un autre soliste, Marcos ARRIETA, qui fait ses débuts sur l'album Big Bang (1992). VULCAIN insiste dans la combinaison entre Hard brut et influences VAN HALEN. Fort convenablement produit, on regrette pour autant certains choix : l'écho sur le chant, des guitares un peu moins mordantes car trop en retrait au profit d'arrangements pas indispensables. Si à l'époque, cet album n'avait pas permis au groupe de renouer avec sa réputation de la fin des années 80, il demeure intéressant à redécouvrir aujourd'hui.

1994 : VULCAIN est redevenu un trio, délaisse ses gourmandises US et revient à une production et un style plus rêches avec un album sans titre. Le répertoire est solide, alternant comme à l'accoutumée "speederies" et mid-tempos carrés, sans pour autant singer ses premiers moments. A noter la reprise, logique de Into The Sun de GRAND FUNK RAILROAD : racines obligent. En dépit d'un son trop métallique et manquant de profondeur, Vulcain ne dépare pas mais, à l'époque, VULCAIN semble avoir perdu une bonne partie de son public, sans pour autant démériter.

Il faut attendre quatre ans pour que déboule Stoppe La Machine, album qui ne bouleverse pas la donne, tant du point de vue du style que de la popularité du groupe. Le son est plus épais (même si le mixage est parfois un peu confus), le groupe assure mais rien n'empêche une séparation orageuse à l'orée du nouveau siècle. Loin d'être relancée, la machine est assurément stoppée.

De nouveau actif sur scène à partir de 2009, VULCAIN remet les pendules à l'heure en 2013 avec un l'album V8 sur lequel le groupe assume avec panache son identité profonde. Idéalement produites par le batteur Marc VAREZ, les compositions s'avèrent pleines de jus, d'aspérités, d'un feeling Rock urgent et salvateur : ça déménage sévèrement, comme aux débuts du combo, sauf que dorénavant, le groupe fait montre d'une maîtrise et d'une précision bluffantes. Le groupe se permet même de dynamiter respectueusement L'Arrivée Du Tour d'Alain BASHUNG.

Absent de ce coffret, l'album Vinyle (2018) a confirmé ce regain de forme et on souhaite que VULCAIN prolonge son activité à ce niveau. Voilà une sacrée poutre à balancer dans la cheminée en ces temps sinistres : une belle flambée en perspective !
Alain
Date de publication : samedi 7 décembre 2019