18 / 20
05/05/2022
This means war
TANK
 
En 1983, le trio britannique TANK était d’ores et déjà à la croisée des chemins. Sorti dans le contexte porteur de la NWOBHM, son premier album Filth Hounds Of Hades (cliquez ici) l’avait installé dans le sillage d’un Rock dur et rebelle à la MOTÖRHEAD. Moins fonceur, voire plus tempéré, son successeur Power Of The Hunter (cliquez ici) n’avait pas tout à fait transformé l’essai. Première décision, exit la formule du trio, avec l’embauche d’un second guitariste, Mick TUCKER, dont l’apport était destiné à épaissir le son global du groupe d’une part, à assurer d’autre part la poursuite maîtrisée de l’évolution vers un Hard Rock plus construit et maîtrisé, initiée avec le second album.

Le fait est que les sept compositions de l’édition originelle montraient un groupe moins fougueux, plus en contrôle, des compositions moins portées par un feeling Rock incandescent que par un souci d’efficacité et de tranchant. A mon humble avis, la musique proposée ici ne faisait aucunement mentir le titre de l’album : TANK avait envie d’en découdre, mais avait quelque peu adapté la furia initiale, au profit d’une approche plus tactique, plus professionnelle, néanmoins diablement efficace. Aux lassantes jérémiades élitistes et nostalgiques émises par les inconsolables du premier album, j’opposerai le bel attirail de titres au rythme nerveux, au tempo enlevé et à l’approche très percutante : l’introductif Just Like Something From Hell (pourtant doté d’une curieuse introduction électronique qui faisait craindre le pire dans ces jeunes années 80 très synthétiques !), Laughing In The Face Of Death, Echoes Of a Distant Battle (dorénavant augmenté du postfixe Swapiyayo pour désigner l’outro en forme de chœurs tribaux), le titre éponyme. Autant de compositions concises, calées sur une section rythmique sévèrement carrée, pourvues de riffs acérés mais non dénuées d’un feeling Rock, de solos de guitare remarquablement construits, de refrains simples mais entêtants, le reste du chant d’Algy WARD demeurant direct et sans fioritures.

Si TANK sut se montrer féroce, il ne faut pas se cacher que sa volonté d’évoluer s’incarna dans des compositions nettement plus accessibles. A l’instar de If We Go (We Go Down Fighting), petit bijou binaire, avec des riffs plus ténus, des guitares plus mélodiques sur le pré-refrain, des lignes de chant plus travaillées et un refrain simplement Rock. I (Won’t Ever Let You Down) se voulait simple, direct, à base de tous petits riffs, de batterie sèche comme un coup de trique, de gros chœurs, d’un chant basique mais en pleine narration : rien d’essentiel, mais demeurait le sentiment qu’avec des ingrédients très allégés, TANK maintenait une nervosité faussement nonchalante.

Le mid-tempo Hot Lead, Cold Steel s’intercalait entre la triplette de titres fonceurs et les compositions plus accessibles. Très efficacement conçu autour d’une rythmique saccadée, de riffs simplissimes mais on ne peut plus tranchants, ce morceau – pourtant pompeusement introduit par de gros riffs soutenus par des claviers pour le moins datés – combinait la lourde efficacité du soudard avec une dramaturgie simple mais palpable (ces riffs qu’on laisse sonner, ce refrain entonné à pleins poumons, ce solo de guitare porteur d’une progression dramatique superbe).

En guise de bonus, les pressages vinyles et CD digipack comprennent les deux morceaux qui figuraient sur la face B du single Echoes Of A Distant Battle, à savoir le fort nerveux et percutant The Man That Never Was et le mid-tempo binaire au possible et menaçant Whichcatchewedmycuckoo.

Reste à évoquer l’accessoire, à savoir le visuel de la pochette. Dans le format CD publié par High Roller records, l’illustration du CD demeure celle de l’édition internationale la plus connue, ultra-efficace, avec ces démons armés qui semblaient vous sauter à la gueule. Faisant preuve d’un extrême bon goût et caressant le collectionneur dans le sens du poil, le fourreau cartonné qui enserre le CD reproduit l’illustration retenue par le distributeur français de l’album, Bernett records ; signée par le fort talentueux Eric SIMON (les ancêtres se souviennent encore de la bande-dessinée Hard & Heavy parue dans Enfer magazine), elle installait de manière fort dynamique un univers de SF guerrier.

En ce qui me concerne, This Means War demeure encore aujourd’hui un album majeur dans la discographie de TANK et représente sans conteste un album solide dans le contexte prolifique de la NWOBHM. Quelques mois après, TANK allait tourner en Europe, en ouverture d’un groupe en devenir… un certain METALLICA, en passe de redéfinir drastiquement les règles du jeu en matière de vitesse et d’impact.

Vidéo non officielle de l’album : cliquez ici
Alain
Date de publication : jeudi 5 mai 2022