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28/07/2022
The devil is a gambler
HELLRYDER
 
Quelques mois après un excellent Fields Of Blood voyant GRAVE DIGGER atteindre un nouveau palier dans sa très longue carrière et clôturer une trilogie sur les Scots, les deux leaders du groupe, le vocaliste Chris BOLTENDAHL et le guitariste Axel RITT, ne pouvant rester en place suite aux divers confinements nécessités par la pandémie en vigueur à l’époque, se sont ligués pour former un combo parallèle portant le doux patronyme de HELLRYDER. Hyperactif de nature, le duo s’est entouré en outre du bassiste Steven WUSSOW (OORDEN OGAN, DOMAIN, ex-MISFIT, ex-XANDRIA, ex-PALACE) et du batteur Tim BREIDEBAND (ex-BONFIRE, ex-FREEDOM CALL, ex-AT VANCE). Que du beau monde en somme dans cette escouade infernale, dont le debut-album, le luciférien The Devil Is A Gambler, aura rapidement été composé par Chris BOLTENDAHL et Axel RITT, puis enregistré en partie dans les locaux des studios New Graveyard à Cologne, ainsi qu’au sein des Meadow Studios à Babenhausen, où la galette a aussi été mixée et masterisée par Axel RITT himself. Sur un concept du vocaliste, l’artwork de ce premier jet du quatuor a été magistralement illustrée par le désormais incontournable Gyula HAVANCSAK.

A contrario de GRAVE DIGGER, la petite troupe n’évolue pas dans un heavy power metal épique et emphatique. Volontairement différente de son aînée, la tribu HELLRYDER débroussaille efficacement ce que le groove metal a de plus excitant. En effet, quand on écoute The Devil Is A Gambler, l’impression d’avoir à faire à du PANTERA, du SOULFLY ou du DAMAGEPLAN est frappante. Rythmiquement, en tous cas, une bonne partie des morceaux est sautillante, ce qui est caractéristique du style originaire des USA. Vocalement, Chris BOLTENDAHL arrive complètement à se détacher de ses racines en adoptant une tessiture encore plus rauque qu’habituellement et se permet des incursions gutturales surprenantes. Guitaristiquement, les mélodies et les riffs sont bien là, naviguant entre le GRAVE DIGGER du commencement et du HELLYEAH en un peu plus gentillet tout en y insérant une pointe de GUN BARREL pour le côté explosif.

Dès l’éponyme Hellryder qui démarre ce The Devil Is A Gambler en fanfare, on reconnait immédiatement les gimmicks d’Axel RITT et de Chris BOLTENDAHL qui sont parmi les plus évidents de la scène metal. Les phrasés typiques du six-cordiste apportent à ce prologue une facette Tattooed Rider qui frappe sur les refrains, tout comme la prononciation et le timbre du frontman le trahissent rapidement. Malgré le tempo saccadé et boitillant, l’analogie peut être faite avec les pièces maîtresses de GRAVE DIGGER sorties dans les années 80, mais aussi avec des rondelles comme Return Of The Reaper et Healed By Metal. La signature artistique de la paire de fossoyeurs faisant acte de présence. De même sur la dynamite en barre Night Rider qui, soutenue, par des claviers discrets et illuminée par un bref solo d’Axel RITT faisant tilt, rappelle le costaud Resurrection Day. D’ailleurs, un certain nombre de pistes sur cette rondelle se rapprochent frauduleusement de ce que le quatuor de Gladbeck produit habituellement. Fort heureusement, HELLRYDER n’est pas un copier-coller à 100% de GRAVE DIGGER et quelques lieds en présence s’extirpent aisément de ce carcan familier. Je peux sans aucun mal citer Sacrifice In Paradise, The Devil Is A Gambler, Jekyll & Hyde, Bad Attitude, Passion Maker, Harder, Faster, Louder ou bien le bonus track I Don’t Wanna Die qui, pour la plupart, sont tous basés sur des rythmiques pesantes, un jeu de basse relativement linéaire et des guitares extrêmement graisseuses, respirant le stoner, le sludge et le heavy rock sudiste, Passion Maker, Harder, Faster, Louder ainsi que que I Don’t Wanna Die sont d’un acabit plus surprenant. Passion Maker, de par son tempo capricant louche sur AEROSMITH, plus particulièrement sur Walk This Way et Love In An Elevator, tandis que Harder, Faster, Louder aurait pu figurer conjointement sur un disque de MOTÖRHEAD, pour le côté hyper speed, de METALLICA, pour la guitare tranchante et le Restless And Wild d’ACCEPT, pour la facette millimétriquement punchy. I Don’t Wanna Die, quant à lui, flirte avec le DEF LEPPARD de Pour Some Sugar On Me grâce à une atmosphère plutôt « glamour » et un son reconnaissable.

Les autres morceaux, qui n’ont pas cette patte GRAVE DIGGER et que je viens de citer dans le paragraphe précédent, relèvent consciemment de quelque désir d’Axel RITT et Chris BOLTENDAHL de séduire un public américain très exigeant, peu habitué à découvrir les « petits » groupes européens qu’il considère comme underground et, cela peut arriver, sans réel intérêt, les états-uniens étant habitués à se gaver de musique commerciale jusqu’à l’écœurement. L’idée brillante de notre duo teuton préféré de mêler des sonorités « exotiques » pour lui et des ingrédients plus rassurants pour nous lui permettra sans aucun doute, du moins je l’espère, de s’insérer sur un marché outre-Atlantique bardé de grosses machines de guerre telles que FIVE FINGER DEATH PUNCH, DOWN ou, désormais, la dernière incarnation (déjà très critiquée) de PANTERA. Même si GRAVE DIGGER a, à de maintes reprises, tâté le terrain aux quatre coins des USA, cette aventure HELLRYDER pourrait bien lui ouvrir quelques portes supplémentaires, voire même, pourquoi pas, cristalliser sa présence sur le territoire de l’Oncle Sam et l’autoriser à jouer dans de plus grandes salles, pas uniquement dans de minuscules clubs.

Demeurent, finalement, ces rejetons du Fossoyeur que sont Faceless Jesus, Chainsaw Lilly et I Die For You, qui auraient pu encore une fois se frayer un chemin sur Return Of The Reaper, Healed By Metal et The Living Dead, toujours à cause de ces sous-accordages et mimiques commodément identifiables. Néanmoins, comme développé plus haut, l’équipe n’est pas la même que celle de GRAVE DIGGER. De légères différences dans l’interprétation et le rendu final sont perceptibles. Notamment au niveau du son de la batterie. Tim BREIDEBAND ayant été brièvement membre de BONFIRE, un combo assurément établi sur la scène hard européenne et au-delà, jouit d’une reconnaissance mondiale grâce à des sorties qui se sont assez bien vendues. Qualitativement, le quintet n’a pas à rougir face à des WHITESNAKE, SKID ROW ou BON JOVI qu’il concurrence frontalement. Toutefois, l’expérience de Tim BREIDEBAND autorise HELLRYDER à se placer à un niveau bien élevé dans le bataillon des escouades du rock éclectique. Pareillement, on sent cette complicité entre le bassiste Steven WUSSOW et Axel RITT quand il s’agit de s’atteler aux passages rythmiques. Quoi de plus normal quand on connaît le parcours des deux hommes qui, si vous ne le savez pas déjà, forment un excellent binôme dans leur Domain. Comme le heavy power metal est une institution pour ce « couple » de branleurs de manches et pour le vocaliste Chris BOLTENDAHL, l’envie de prendre momentanément le large pour s’acoquiner d’un autre style était obsédante. D’où la mise en place automatique de cet équipage de marins aguerris, désireux de naviguer sur les eaux tumultueuses du succès et de découvrir des horizons lointains encore vierges.

HELLRYDER n’invente rien de neuf. Le groupe se contente de rédiger une page neuve en recyclant des figures de style plusieurs fois utilisées par ses prédécesseurs. Cela dit, les gars nous ont concocté là un plat vraiment savoureux, nonobstant les introductions clonées les unes sur les autres. The Devil Is A Gambler ne changera pas la face du monde ni ne révolutionnera l’art sonique. Pléthores de formations s’en sont déjà occupées naguère. Cependant, HELLRYDER y met son petit grain de sel et arrive à nous arracher un gros sourire, à nous faire taper du pied, à nous défoncer la nuque et à faire lever notre petit cul du confortable canapé qui sert d’assise à notre fainéantise légendaire pour nous amener dans un pogo méphistophélique à l’ancienne. Chris, Axel, Steven et Tim nous ont pondu-là un très digne premier effort qui, je l’espère, aura une prochainement une suite. Maintenant que la pandémie s’est en allée hanter des contrées pour elle inexplorées, il n’y a plus rien qui empêche HELLRYDER, premier leader européen sur le marché du heavy groove metal, de présenter son œuvre sur scène. Hélas, l’hélice, c’est là qu’est l’os, une vingtième dose de GRAVE DIGGER doit nous être injectée fin août de cette année. Les chances de voir HELLRYDER faire son show dans un proche avenir sont, donc, très minces, d’autant plus que le Creuseur De Tombes, en tournée actuellement pour rattraper son retard dans la version live de Fields Of Blood, sera aussi par monts et par vaux en fin d’année pour promouvoir le très attendu Symbol Of Eternity, suite espérée du ténébreux Knights Of The Cross dont GRAVE DIGGER a accouché en 1998. Dommage pour The Devil Is A Gambler qui aurait, pourtant, gagné en popularité si l’intégralité des douze titres qui le composent avait pu être transposée du studio vers une salle de concerts. Si vous appréciez les grattes qui bavent, les rythmiques qui claudiquent et les timbres caverneux, jetez-vous sur ce debut-album de HELLRYDER qui, à défaut de vous laisser pantoisE, vous procurera beaucoup de plaisir.



Line-up :

Chris BOLTENDAHL (chant)
Axel RITT (guitares)
Steven WUSSOW (basse)
Tim BREIDEBAND (batterie)


Equipe technique :

Chris BOLTENDAHL (production, concept artwork et livret)
Axel RITT (enregistrement, mixage, mastering, production)
Gyula HAVANCSAK (artwork)
Jens HOWORKA (photographie)


Studios :

Enregistré aux New Graveyard Studios (Cologne, Allemagne)
Enregistré, mixé et masterisé aux Meadow Studios (Babenhausen, Allemagne)


Crédits :

Chris BOLTENDAHL (paroles, musique)
Axel RITT (paroles, musique)


Tracklist :

1) Hellryder
2) Sacrifice In Paradise
3) Night Rider
4) The Devil Is A Gambler
5) Jekyll And Hyde
6) Faceless Jesus
7) Chainsaw Lilly
8) I Die For You
9) Bad Attitude
10) Passion Maker
11) Harder Faster Louder
12) I Don’t Wanna Die (bonus track)

Durée totale : 39 minutes 08 secondes


Discographie non-exhaustive :

The Devil Is A Gambler (2021)


Date de sortie :

Vendredi 28 mai 2021



Clips vidéo :

Hellryder
The Devil Is A Gambler
Night Rider
神の知恵
Date de publication : jeudi 28 juillet 2022