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20/09/2023
Full moon’s eyes
OSTROGOTH
 
Quand, en 1983, le groupe belge OSTROGOTH sort son premier mini-lp quatre titres, Full Moon’s Eyes (d’abord en autoproduction pour les 1000 premières copies, puis sur le label Mausoleum), on pourrait penser qu’il s’agit de l’œuvre de débutants. Il n’en est rien puisque certains membres du groupe ont été actifs durant les années 70 au sein de formations confidentielles, comme TRASH ou STONEHENGE. Le fait est que les quatre compositions proposées témoignent tout à la fois d’une maîtrise dans la composition, d’une fougue dans l’interprétation. Loin des cohortes de formations de Heavy Metal basique qui encombrent l’underground, OSTROGOTH a pris bonne note que JUDAS PRIEST avait changé la donne en 1978, avec le titre d’ouverture de l’album Stained Class, à savoir le rapide et nerveux Exciter.
Oui, la vitesse amène l’excitation, renforce le tranchant des riffs de guitare et des rythmiques. Pour oublier une situation économique qui se déglingue en Occident, il faut pouvoir se griser de manière moderne, donner l’impression qu’en écoutant un disque, on chevauche une moto en bloquant la poignée en coin, le tout au travers d’un univers urbain hostile et délabré.

D’entrée de jeu, le morceau éponyme vous saisit à la gorge : une fois passée une délicate introduction fort mélodique, mêlant guitares acoustique et électrique, résonne un riff majestueux, avant que la batterie n’embarque le tout sur un train d’enfer. Vitesse, à la limite de la frénésie donc. Inévitablement, l’auditeur subit une brusque montée d’adrénaline. Pour autant, le groupe maintient une grande netteté rythmique et fait montre d’une exigence mélodique essentielle (refrain simple mais mémorisable, lignes de chant pas spectaculaires mais dûment modulées, plans de guitares harmonisées, solo de guitare simple mais excitant). Qui plus est, loin de se croire obligé de couiner comme un goret ou de grasseiller comme un ours enroué, le chanteur Marc de BRAUWER assumait avec aplomb un timbre médium et un registre clair, quitte à muscler le propos en crispant ou en montant dans les aigus de manière ponctuelle.
Le titre suivant, le fier Heroe’s Museum, adopte un tempo plus pondéré, tout en conservant cet équilibre entre efficacité rythmique et apports mélodiques, tant vocaux qu’instrumentaux. Impossible de ne pas souligner l’énorme travail, dynamique et complexe, produit par le batteur Mario PAUWELS.
Davantage orienté mid-tempo, Paris By Night assure le coup en mode JUDAS PRIEST mélodiquement marquant et rythmiquement efficace. Inutile de préciser que le headbanger normalement sera plus qu’heureux de retrouver sur le conclusif Rock Fever (et bien nommé) ses repères en matière de mélodies acérées (belle complémentarité des guitares), de tempo rapide et de chant contrôlé mais expressif.

Cette réédition par High Roller records, pertinente en soi, comporte toutefois une version démo du morceau Ecstacy And Danger, qui allait donner son titre au premier album du groupe. Excellemment produite, cette version précoce montre un versant plus menaçant et mid-tempo du Heavy Metal développé par OSTROGOTH.

Avec le recul, on ne peut que regretter que les premiers pas discographiques n’aient pas eu lieu deux ou trois ans plus tôt, à un moment où la maturité et la classe d’OSTROGOTH auraient permis de les distinguer de la masse des groupes de Heavy Metal en devenir. En 1983, une jeune formation nommée METALLICA allait drastiquement rebattre les cartes du Metal… Ce qui ne remet aucunement en cause la qualité encore palpable de ce tir d’essai, vivace et drument asséné.

PS : chronique dédiée du fond du cœur à l’immarcescible Pascal Raskal Clair.

Vidéo non officielle du EP originel : cliquez ici
Alain
Date de publication : mercredi 20 septembre 2023