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Le true heavy metal est une source de jouvence
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Mise en garde - Au mieux, je peux tenter de transcrire ce que je ressens à l’écoute d’un album avec une double contrainte : d’une part, l’écriture n’est que le déchet de la pensée comme nous l’enseigne Chouang Tseu, et d’autre part, une critique musicale ne peut en aucun cas être objective puisque la perception de la musique est par nature subjective, faisant appelle à la culture, à l’histoire et à l’affectif de chacun.
Cette mise en garde s’applique à toutes mes chroniques. Je la formule aujourd’hui car pour SIREN, plus que pour tout autre groupe, j’ai une forte affection. Dans les années 80, Doug LEE a été parmi mes plus fidèles correspondants (comme Nasty Ronnie de NASTY SAVAGE qui curieusement était aussi à Brandon en Floride). C’était l’époque où, lorsque j’écrivais aux USA je n’espérais pas de réponse avant 10 jours. C’est amusant de penser à cela alors qu’aujourd’hui quand j’envoie un mail je m’impatiente si je n’ai pas de retour dans la journée. Bref, j’ai diffusé en radio et chroniqué Metro-Mercenary, le premier 45t du groupe (1984), puis les deux démos suivantes Iron Coffins (1985) et Dead Of Night (1986), ainsi que No Place Like Home leur premier LP de 1986. En 1989, le groupe sort son second LP, Financial Suicide et se mettra en pause l’année suivante pour un sommeil plus long que prévu.
En effet, il faudra attendre 2018 pour que SIREN soit contacté par les organisateurs du fameux festival Keep It True et c’est cette sollicitation qui relancera la machine. La participation au KIT réactivera le plaisir de jouer, déclenchera la réalisation d’un triple vinyle ou double CD anthologique intitulé Up From The Depths, mais aussi le tournage d’un film qui documente la résurrection du groupe : I’m Too Old For This Sh*t, A Heavy Metal Fairy Tale réalisé par Chris JERICHO. Et comme ce retour n’est pas un feu de paille, en 2020 le groupe sort un album de 15 titres originaux, Back From The Dead, complété en 2022 par le EP Lost Tracks From The Dead +1. Nous voici enfin arrivé au sujet du jour : A Mercenary’s Fate publié en octobre 2022 dont le titre fait évidemment référence au 45t de 1984.
Bref aparté - L’histoire de SIREN ressemble un peu à celle des français de SORTILÈGE car le line-up actuel n’est plus vraiment celui des débuts, et le guitariste fondateur a créé un SIREN-bis libellé ROB PHILLIPS SIREN… enfin, c’est assez compliqué.
Quoi qu’il en soit, A Mercenary’s Fate nous convie pendant presque une heure, à un vivifiant retour aux sources du true heavy metal dans sa version à la fois mélodique et acérée. Pour un groupe américain, ce qui frappe c’est son parfum très britannique. Les membres de SIREN citent d’ailleurs parmi leurs influences majeures : JUDAS PRIEST, SAXON, IRON MAIDEN – les locomotives de la NWOBHM - auxquelles ils ajoutent ACCEPT. À ce propos, il est tout à fait étonnant de constater la manière dont la voix de Doug se rapproche par moments du timbre d’Udo DIRKSCHNEIDER avec ce côté un peu teigneux, cette hargne maligne et finalement très théâtrale. A noter que leur metal classique est ici très bien desservi par le mixage de Jim MORRIS du Morrisound Recording de Tampa.
Click. C’est parti - Soul Breaker ouvre le bal. Le riff est incisif, la basse tonitruante, le son clair et puissant – ça commence très bien. Tiens ? le phrasé du refrain me rappelle Highway Star de DEEP PURPLE - me voici en confiance. La seconde plage, City Of Lost Souls démarre par un riff bien bétonné sur lequel un comédien prend la parole d’une voix grave, chaude et posée qui contraste avec le chant de Doug. Ce morceau renforce clairement mon désir d’aller plus loin dans l’écoute. Sur un groove très sabbathien période Dio, Dead Eyes Lying In The Rain est un de mes titres préféré, excellent rythme, jolie coupure mélodique à mi-parcours à laquelle succède un redécollage puissant. Avec son fond épique et son petit bourrinage à la double grosse caisse, Slaughterbots est un délicieux mélange de toutes les influences du groupe décidément bien assimilées. L’architecture du titre est complexe mais pas dédaléenne. J’adore ! Dans un genre power metal plus affirmé avec des passages rythmiques très rapides et d’une remarquable précision, Queen Of Sin se laisse consommer sans modération – speed et entraînant. Arrive alors le titre qui donne son nom à l’album A Mercenary’s Fate, là, je suis scotché par la cavalcade de basse que réalise Rich GRAY sans faiblir, assurant ainsi une vraie prestation en mode Steve HARRIS activé. Le morceau gagne en relief grâce à un superbe changement de rythme auquel succède un brillant solo de guitare. Quant au final, du pur IRON MAIDEN compatible – j’adore ! One’s Man Fight continue sur la lancée, une pièce incisive et bourrée d’énergie qui nous offre une nouvelle fois un très bon solo et un riff de tueur à la fin – quel morceau ! Le feu d’artifice continue avec Revenge Of The Bastards qui me fait penser à un brulot de JUDAS PRIEST. Ce titre accueille en son centre un excellent passage mélodique. La construction est osée et les amoureux de duels de guitares seront aux anges. Il n’y a décidément aucun répit sur cet album et si I am The Wolf paraît calmer un peu le jeu du point de vue vitesse, c’est pour mieux gagner en puissance par la suite. Une fois encore, impossible de ne pas mentionner les parties de guitare acharnées. Quel riff pour l’ouverture de Welcome To The Grave ! L’alliance puissance & mélodie de SIREN dans toute sa splendeur. Presque cinquante minutes se sont écoulées et je n’ai pas vu le temps passer. Me voici parvenu à l’instrumental de clôture. Je pensais que le quintette avait finalement réussi à retrouver son calme au début de Prologue To Redemption mais il n’en est rien. Ce morceau prend simplement feu plus progressivement que les autres, même si dans le dernier tiers le violoncelle de Ryan TATUM tente d’éteindre l’incendie. Un très beau final.
Est-ce en raison de son long sommeil que SIREN a gardé toute sa fraîcheur ? À moins que le true heavy metal ne soit une source de jouvence ? En tout cas, le metal de SIREN n’a pas pris une ride et cet album plaira à coup sûr aux fans de metal traditionnel et peut constituer une excellente porte d’entrée vers ce style pour la jeune génération.
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SIREN est composé de : - Hal DUNN, guitare ; - Ed ABORN, batterie ; - Doug LEE, chant ; - Gregg CULBERTSON, basse ; - Todd GRUBBS, guitare.
NB. Sur cet album (sauf Prologue To Redemption), le multi-instrumentiste anglais Rich GRAY (AEON ZEN, ANNIHILATOR…) a écrit et joué toutes les lignes de basse en remplacement de Gregg malheureusement indisponible sur la période du passage en studio.
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- Pour découvrir A Mercenary’s Fate en streaming c’est par ici ! - Pour obtenir l’album en Europe, vous pouvez le commander auprès du label allemand FHM Records, par là !
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