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Doom death lumineux
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Comme tout groupe de Doom Death ou de Funeral Doom, INBORN SUFFERING développe un univers consacré aux aspects les plus sombres de la condition humaine. Paradoxalement, il faut avoir une foi inépuisable pour se vouer au Doom Death depuis 2002. Mais c’est bien cette foi de charbonnier qui meut INBORN SUFFERING depuis sa mise en production discographique avec l’album Wordless Hope via le label Sound Riot records en 2006. Une foi qui meut et qui m’émeut, moi qui n’ai découvert le groupe qu’en 2012, via leur second album, Regression To Nothingness, envoyé par le label russe essentiel Solitude productions. Cela dit, je n’ai pas été si dilettante que cela, puisque l’activité discographique du groupe a essentiellement consisté à livrer une version révisée de Wordless Hope en 2022.
C’est donc avec une impatience, d’autant plus sincère que non anticipée, que j’ai découvert ce troisième album autoproduit. Fort heureusement, INBORN SUFFERING s’avère tout aussi convaincant en 2025 que dans le premier quart de siècle. En effet, le groupe n’a en rien renié sa passion pour le Doom Death, exprimé via des formats pour le moins conséquents : quatre compositions entre dix et treize minutes, excusez du peu !
Cela dit, la longueur des morceaux peut s’avérer un naufrage pour tout groupe qui s’en prévaut aussi ostensiblement. Ecrasons d’emblée tout suspens : dans le cas présent, nul ennui, nulle fatuité, rien que la passion encore ardente pour les sentiments négatifs. Fuyant les impasses du Funeral Doom, INBORN SUFFERING impose sans coup férir son savoir-faire. Certes, le tempo impose logiquement la lenteur ; mais une accélération n’est pas à exclure (dans le dernier tiers de From Lowering Tides, pas plus qu’une plage dépourvue de section rythmique (au 2/3 du titre éponyme). Loin d’être des artifices, ces variations au sein d’un théâtre lent et lourd injectent de rares, mais précieux contrepoints. Reste à traiter de manière intéressante un matériau par définition pesant, toujours guetté par le monolithisme, l’ennui se tenant immanquablement en embuscade.
Objectivement, la discographie du groupe s’avère famélique au vu de son ancienneté. Laquelle ne correspond aucunement avec l’apparition du Doom Death, pas plus qu’ave celle du Funeral Doom. Suite à une première écoute, je me surprends à enquiller cet album littéralement jour et nuit, encore et encore. Pourtant, il n’y a objectivement rien de revolutionnaire dans ce Doom Death : lenteur générale du tempo, vocaux caverneux et mixé en plein milieu de l’instrumentation, riffs granuleux… La panoplie est complète.
Tout le talent d’INBORN SUFFERING consiste à apposer sa patte sur un classicisme impeccablement déroulé. Il y a par exemple cette capacité à dynamiser le tempo, via un jeu de batterie plus complexe qu’il n’y paraît. Des riffs très distinctement assénés, davantage axés vers les mélodies tordues que vers un vain mur du son. Des vocaux gutturaux, quoique fort nettement articulés, surtout fréquemment renforcés par des aigreurs typiquement Black Metal, par des séquences parlées, et même par des arrangements harmonisés. Tout ceci capté de manière vibrante par une production vivace et, surtout exposé de manière limpide par un mixage limpide et puissant.
Avec un tel dispositif, équidistant du pur classicisme et de l’appropriation judicieuse, INBORN SUFFERING livre un viatique précieux pour les (trop) rares amateurs de Doom Death, voire de Funeral Doom. On se permettra d’émettre l’humble vœu de ne pas avoir à patienter une décennie pour découvrir la suite créative d’INBORN SUFFERING.
Splendide vidéo mélancolique de From Lowering Tides : cliquez ici
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