Au sortir de la période environnant Raw To The Bone, il est certain que WISHBONE ASH est une valeur dépréciée. Si les concerts attirent toujours un public conséquent, les ventes de disques sont en berne. Le début des années 80 fut donc marqué par des albums de qualité qui ne rencontrèrent par leur public. Cela dit, le groupe dispose d’un réservoir de fans suffisamment conséquent pour que pullulent compilations et albums live en tous genres, documentant de facto toutes les périodes du groupe. Pour notre part, nous ne rendrons compte que des parutions présentes sur le site officiel du groupe. Revenons à nos moutons. Afin de sauver les meubles, un double mouvement stratégique se produit : le retour du manager originel Miles COPELAND (entretemps devenu boss du label IRS), ainsi que le retour au bercail de Martin TURNER (basse et chant) et de Ted TURNER (guitare). Aussitôt, la vieille garde des fans du début années 70 se mit en rang pour accueillir le retour du line-up originel. Dans un premier temps, la déception fut assez nette…
NOUVEAU CALLS (1987) 13/20 Première alerte : une pochette foutraque, mettant notamment en scène une Flying V et une Les Paul, histoire d’appâter les nostalgiques des guitares jumelles. Le fait est que l’on entend des solos à la fois incisifs et mélodiques, ainsi que quelques belles conjugaisons en tandem. Seconde alerte : le choix de William ORBIT, spécialiste ès musiques électroniques, comme producteur et mixeur, Martin TURNER s’arrogeant le titre de co-producteur. Troisième alerte : il s’agit d’un album instrumental. Conscients de n’être pas des chanteurs acrobatiques, les musiciens du groupe ont systématiquement opté pour un chant principal clair, renforcé par de nombreuses harmonies. A telle enseigne que cette formule devint une signature du son WISHBONE ASH. En somme, le groupe se prive d’un de ses atouts majeurs.
Résultat des courses ? Nouveau Calls s’impose comme l’album qui sonne le moins WISHBONE ASH de toute la discographie du groupe. Est-ce pour autant un mauvais album ? Sans mésestimer la frustration des fans, on peut tout d’abord saluer la prise de risque de la part du groupe. Passée une première expérience déceptive, on peut tout à fait prendre plaisir à laisser défiler ces tranquilles pérégrinations, effectivement généreuses en solos à deux guitares, mélodiques à souhait. Par contre, les arrangements électroniques et les synthétiseurs, pénibles à l’époque, extrêmement datés aujourd’hui, gâchent franchement de bons moments.
Plus problématique, à la même époque paraissent des disques instrumentaux de la part de pointures de la guitare. Que l’on songe à l’essentiel Surfing With The Alien de Joe SATRIANI, paru également en 1987 ! Si on peut saluer la prise de risques de la part du groupe, ainsi que les qualités intrinsèques de cet album, il faut bien avouer qu’il s’agit d’un flop commercial et d’une réalisation artistique pour le moins controversée.
HERE TO HEAR (1989) 17/20 Loin de se décourager, le quartette se remet la tête à l’endroit et réintroduit le chant sur Here To Ear, album produit par le bassiste et chanteur Martin TURNER. Pour profiter pleinement de cet album juteux, il faut, en premier lieu, faire abstraction de sa pochette ringarde, en second lieu pardonner un son de batterie trop axé sur la caisse claire.
Hormis ces deux facteurs finalement secondaires, on a plaisir à retrouver un WISHBONE ASH à la tête de compositions concises, principalement mid-tempo, cisaillées par des guitares nerveuses, portées par des lignes vocales mélodiques à souhait. Globalement, on se situe dans la famille des albums axés sur la mélodie, tels que le groupe les a alignés depuis There’s The Rub. Qui plus est, les compositions de cet album regorgent d’accroches mélodiques, qu’elles soient instrumentales ou vocales. Pour s’en convaincre, in suffit de se laisser porter par la composition conclusive, Hole In My Heart, divisé en deux pistes distinctes ; toute la magie inhérente à WISHBONE ASH s’y déploie dans toute sa superbe.
Pour quiconque s’intéresse au groupe, Here To Ear constitue une bonne surprise, assez inattendue à ce stade de sa carrière. Cela dit, son insuccès commercial ne permit pas de sortir de l’ornière. Il s’agit d’ailleurs du dernier album enregistré par le fidèle batteur Steve UPTON.
STRANGE AFFAIR (1991) 17/20 C’est donc sans son métronome historique – remplacé pour l’essentiel par Ray WESTON - que le trio restant s’attelle à l’écriture et à la réalisation de Strange Affair, autre pépite oubliée, faute d’avoir rencontré une juste reconnaissance au moment de sa parution. Sans être un chef d’œuvre, ce disque s’avère gouleyant à souhait, affichant une vivacité salvatrice, conjuguée avec un sens affûté de la mélodie : que ce soit sur le plan instrumental ou vocal, les accroches sont omniprésentes. Essayez un peu d’échapper à Wings Of Desire, ses guitares affutées, ses lignes de chant divinement modulées, ces harmonies vocales qui font la différence. Avec une promotion digne de ce nom, ce titre aurait pu cartonner de par le monde ! Tout le reste de l’album s’inscrit dans la lignée de There’s The Rub, soit un équilibre précieux entre une approche limpide et mélodique d’une part, un mordant assuré par les deux guitaristes.
Même si Strange Affair ne redresse pas foncièrement les ventes de disques, il constitue encore aujourd’hui une bien bonne affaire et fait figure d’album sous-estimé, à l’instar de tous les albums depuis la fin des années 70. Hélas, il ferme la parenthèse du retour de Martin TURNER et de Ted TURNER ; WISHBONE ASH va devoir une fois de plus se réinventer, Andy POWELL demeurant le seul membre originel. Cette seconde séparation semble avoir été suffisamment houleuse pour que Martin TURNER se produise sur scène, publie des disques et produise du merchandising affichant ostensiblement la marque WISHBONE ASH. Ambiance…
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