Doom : la marque d'un retour superbe
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Au cours de la première décennie de ce siècle, le trio américain THE GATES OF SLUMBER a représenté une sorte de bouée de sauvetage, comme une manifestation vivace de la survivance d’un Heavy Metal épique et épais, à mi-chemin entre le BLACK SABBATH originel et des groupes signés chez Hellhound records dans les années 90 (SAINT VITUS, THE OBSESSED, UNORTHODOX, IRON MAN, WRETCHED, COUNT RAVEN, INTERNAL VOID, LOST BREED…). Dès ses débuts, le groupe se trouva labélisé Doom Metal. Sauf que tous les albums témoignent d’une vivacité davantage typique d’un certain Heavy Metal underground, à tendance épique, en cours lors des années 80 (MANILLA ROAD, le MANOWAR des premiers albums, GRIFFIN, BROCAS HELM, ASHBURY…). Avec … The Awakening (2004), Suffer No Guilt (2006), Conqueror (2008, relire ici : cliquez ici), Hymns Of Blood And Thunder (2009, relire ici : cliquez ici) et The Wretch (2011, relire ici : cliquez ici), nous tenons autant de manifestes d’un Heavy Metal batailleur, certes épais mais mobile, relativement peu adepte des tempos lents propres au Doom, qu’il soit classique ou épique.
Nul doute que THE GATES OF SLUMBER aurait pu continuer à aligner des albums palpitants et des tournées internationales devant un public restreint mais fervent. Seulement, la Faucheuse a moissonné le bassiste Jason McCASH et le batteur Iron Bob FOUTS. Face à cette lugubre adversité, le guitariste et chanteur Karl SIMON mit THE GATES OF SLUMBER en pause pour une durée indéterminée, optant pour un nouveau trio, WRETCH, accouchant d’un superbe album sans titre en 2016.
Ayant surpassé les deuils, Karl SIMON a légitimement réactivé THE GATES OF SLUMBER, toujours en configuration trio, avec le renfort de Steve JANIAK à la basse (par ailleurs membre du fort méritoire combo Doom APOSTLE OF SOLITUDE) et de Chuck BROWN (lui aussi membre de APOSTLE OF SOLITUDE). Les concerts se bonifiant, le rescapé SIMON était au pied du mur. Fort logiquement, cette nouvelle mouture de THE GATES OF SLUMBER délivre un sixième album en forme de nouveau départ. En témoignent ostensiblement l’absence de titre propre, le design réduit au logo du groupe (dommage, étant donnés les artworks très significatifs de la discographie du combo jusqu’à présent) et la redéfinition du son global du groupe.
Là est la vertu cardinale de ce nouvel album, à savoir son recentrage franc et massif en direction du Doom Metal, relevant pour l’essentiel du Doom classique, avec de surcroît des touches plus nettement marquées en direction du Doom épique. Globalement, le tempo opte pour une franche lenteur, laquelle combinée avec l’épaisseur de la section rythmique et avec le rendu massif et granitique des riffs, la pesée totale basculant franchement vers le Doom.
Un paramètre essentiel n’a pas changé depuis les débuts du groupe, à savoir le souci de délivrer un rendu brut, aux contours très nettement dessinés, qu’il s’agisse de motifs purement rythmiques ou de signatures mélodiques (principalement prodiguées par la guitare solo). Sur le plan vocal, pas plus que par le passé, Karl SIMON ne s’engage dans des registres acrobatiques ; pour autant, il impose des modulations vivaces à un registre médium axé vers l’efficacité. On note même quelques arrangements, certes simples, mais efficaces dans l’enrichissement des lignes vocales.
Autre élément marquant de cet album, la durée des compositions répartit les titres en deux catégories : soit trois morceaux au format ramassé (entre quatre et cinq minutes), les deux morceaux conclusifs au-delà de sept minutes, demeurant une piste pivot (l’introductif Embrace The Lie et ses 6’27). Même si les titres les plus concis n’empêchent aucunement les variations rythmiques, il faut bien admettre que les deux compositions dépassant le cap de sept minutes, The Fog et The Plague, permettent tout particulièrement de varier les ambiances, de mettre en place un dispositif dramatique spécifique et de placer des accélérations vivifiantes.
Ce retour aux affaires de THE GATES OF SLUMBER apparaît comme une combinaison ô combien efficiente du Heavy Metal épique des années 80 et du Doom classique de la même période. Sauf que, dans le cas présent, on n’a aucunement l’impression d’entendre une pénible redite du Metal de jadis, mais bien au contraire une réinvention d’un Heavy Doom Metal, certes inspiré par les années 70 et 80, mais réanimé pour le siècle suivant.
Compositions accrocheuses, interprétation vibrante et totalement investie, production brute et mixage surpuissant : voilà ce que j’appelle un retour gagnant, qui s’impose à tout fan de Doom, tant classique qu’épique, mais aussi à tout zélateur de Heavy Metal épique.
Vidéo de Embrace The Lie cliquez ici
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