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Un démarrage flegmatique...
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Last In Line...3 mots qui, pour certain(e)s d’entre vous, peuvent avoir une signification bien particulière, surtout si vous êtes fans de heavy metal traditionnel, comme je le suis moi-même. En effet, après un immense Holy Diver, Ronnie James PADAVONA, alias R .J. DIO, petit par la taille, certes, mais immense par son charisme et son talent, alors ancien vocaliste des formations légendaires ELF, RAINBOW et BLACK SABBATH, et la mise en route de son projet solo intitulé tout simplement DIO, a remis le couvert avec un second album, tout aussi excellent que le premier d’ailleurs, le cultissime Last In Line.
Alors que son prédécesseur a entièrement été écrit et composé par Ronnie lui-même, Last In Line, a, quant à lui, été un effort de groupe puisque le bassiste Jimmy BAIN (ex-LAST IN LINE, ex-RAINBOW, ex-THIN LIZZY, ex-WILD HORSES, ex-DIO), le guitariste Vivian CAMPBELL (DEF LEPPARD) et même le batteur Vinny APPICE (SERPENT’S RIDE, ex-DIO, ex-BLACK SABBATH, ex-HEAVEN AND HELL, ex-KILL DEVIL HILL) ont participé à la création de ce petit bijou de heavy metal made in US. C’est d’ailleurs Jimmy BAIN qui est à l’origine du titre éponyme, même s’il a été coécrit avec Vivian et Ronnie. Cette collaboration entre les musiciens a fait de ce second enregistrement studio un énorme succès commercial grâce à des titres aussi puissants que We Rock, One Night In The City ou, bien sûr, Last In Line.
Après de multiples changements de line-up et des opus suivants plus ou moins réussis, la formation new-yorkaise s’est automatiquement dissoute en 2010 après la mort tragique de Ronnie, qui a succombé à une bataille de plusieurs mois contre un cancer de l’estomac, annihilant également de ce fait pour la reformation du BLACK SABBATH de la période 1981-1983 (le quatuor ayant interprété les fabuleux Heaven And Hell et Mob Rules, ainsi que le moins réussi Dehumanizer en 1992), évoluant sous le nom de HEAVEN AND HELL de 2006 à 2010, de permettre à un éventuel successeur du lourd et puissant The Devil You Know de voir le jour.
Cette disparition, aussi bien dramatique que subite pour sa femme Wendy et la communauté metal mondiale, a laissé un énorme vide qui n’a pu être comblé jusqu’à présent.
Voulant rendre hommage à l’inventeur des fameuses « cornes du Diable », de nombreuses personnalités diverses et variées toutes issues de la scène rock ont souhaité s’impliquer dans différents projets sous forme de tribute-albums (Ronnie James Dio – This Is Your Life, Magic – A Tribute To Ronnie James Dio, Holy Dio – A Tribute To The Voice Of Metal, A Light In The Black – A Tribute To Ronnie James Dio) ou, plus récemment, de tribute-bands (TEMPLE OF DIO, DIO DISCIPLES) mais aussi de combos inspirés par l’univers de DIO (REVOLUTION KINGS, SERPENT’S RIDE).
Cependant, aucune des réalisations ou des formations citées ci-dessus (à l’exception du TEMPLE OF DIO des frangins Jo et David AMORE) n’est assez convaincante, ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, même si l’on est fan de longue date du « petit » bonhomme de Big Apple, il faut quand même avoir un bagage suffisant pour s’attaquer à des hymnes telles que Stand Up And Shout, Holy Diver, Rainbow In The Dark, The Last In Line, All The Fools Sailed Away ou même Better In The Dark. Ensuite, toutes les tessitures de voix ne collent pas au répertoire de Ronnie. Ainsi, il est assez déplaisant de constater que James HETFIELD (METALLICA) ou Jesse LEACH (KILLSWITCH ENGAGE) se sont essayé à l’exercice de la reprise d’un morceau du regretté Ronnie James, respectivement sur un medley et Holy Diver. Rien que ces deux chanteurs rendent déprimant le TA RJ Dio – This Is Your Life, tout comme DORO qui s’efforce tant bien que mal de bouleverser l’auditeur avec un Egypt (The Chains Are On) un peu trop à sa façon, voire même Glenn HUGHES, dont l’organe vocal ne sied uniquement qu’à DEEP PURPLE ou HTP. Enfin, pour que ces sorties soient un minimum captivantes, elles auraient dû, en premier lieu, être pleines de Vie. Ce qui n’est, malheureusement, pas le cas, étant donné que la plupart des interprétations sont sans âme, sûrement à cause d’une production trop lisse, pas assez organique. Un comble quand on sait que DIO se donnait entièrement dans ses chansons, les animant avec verve et chaleur.
Toutefois, dans cette multiplicité d’hommages, un seul vaut son pesant d’or.
C’est en 2012 que Vivian CAMPBELL, Vinny APPICE et Jimmy BAIN, accompagnés du claviériste Claude SCHNELL (ex-DIO) et d’une jeune recrue en la personne d’Andrew FREEMAN (SNOW, ex-LYNCH MOB), ont l’idée de se réunir comme « au bon vieux temps » pour le fun et de reprendre les standards de DIO lors d’une série de concerts sous le pseudonyme de LAST IN LINE. Logique, quand on sait que ce sont Vivian, Vinny et Jimmy, ainsi que Claude, qui apparaissent sur Last In Line, la deuxième rondelle de DIO. Après plusieurs bœufs scéniques pour faire plaisir aux adorateurs de Ronnie et, plus généralement, de la première période de sa discographie, les quatre compères ont pris la sage décision de ne plus être un simple tribute-band et de devenir un vrai groupe, avec des compos originales.
C’est ainsi que peu de temps après, et en fonction de l’emploi du temps de chacun, déjà bien remplis avec leurs formations respectives, les cinq compères se sont mis à écrire de nouveaux titres. Presque trois longues années pour réaliser, enregistrer et sortir un album dans la droite lignée des travaux « diosiens ». C’était à prévoir étant donné que nous avons là les trois/quatre compositeurs principaux de DIO. Donc, retrouver l’atmosphère typique présente sur la plupart des disques du défunt interprète de We Rock ou Sunset Superman était plus qu’une évidence.
Bien entendu, sans DIO, la magie n’est plus la même. Cela dit, Andrew s’en sort honorablement. Mais, il n’est pas DIO et c’est ce qui pêche principalement sur Heavy Crown. J’ai eu parfois la fâcheuse impression que le blondinet plaçait sa voix un peu trop haut par rapport à la tonalité de chaque morceau. Ce qui induit cette sensation persistante d’un certain décalage entre ses parties de chant et le reste des instruments, un peu comme Bruce DICKINSON sur The Number Of The Beast. Néanmoins, Andrew n’est pas un débutant dans le métier et arrive, malgré tout, à être plus ou moins convaincant. Tout dépend des titres, en fait. Sur Devil In Me, par exemple, on le ressent assez à l’aise. Tandis que sur Martyr, il a l’air d’avoir du mal à explorer les notes plus graves. Son organe vocal est, somme toute, assez linéaire, pas assez versatile comme celui de Ronnie. Il reste, toutefois, un excellent frontman sur scène.
De plus, les morceaux ne sont pas non plus toujours très intéressants, même si l’on y retrouve la patte « DIO ». A part quelques titres bien pêchus ou plus martiaux, tels que la chanson d’ouverture Devil In Me, Martyr, I Am Revolution, Already Dead ou Heavy Crown, il n’y a rien de bien excitant à se mettre sous la dent.
Toutefois, le plaisir de l’écoute est bel et bien là, tout comme celui de retrouver furtivement l’un de nos trios de choc favoris ayant été à l’origine de deux des plus légendaires albums de tous les temps : Holy Diver et Last In Line. Et cela n’a pas de prix. D’autant plus quand on se remémore amèrement que Jimmy BAIN a tragiquement tiré sa révérence quatre jours seulement après l’arrivée dans les bacs de son unique et ultime participation avec ses confrères musiciens au sein du groupe LAST IN LINE, dont il avait eu l’idée en premier.
Ce départ soudain lors de la croisière organisée par DEF LEPPARD, l’autre combo de Vivian CAMPBELL, a suscité beaucoup d’émotions parmi ses collègues de LAST IN LINE (sans parler de la communauté metal toute entière) et les incertitudes quant à l’avenir de son dernier projet musical restent d’actualité, même si Vivian, Vinny et Andrew (exit Claude qui a été limogé en 2015) ont souhaité se donner le temps de la réflexion. Heureusement, une éclaircie se profile à l’horizon sur la possibilité d’un éventuel second opus grâce au recrutement, temporaire pour le moment, d’un nouveau bassiste en la personne de Phil SOUSSAN (ex-Ozzy OSBOURNE, ex-Johnny HALLYDAY, ex-Billy IDOL, ex-TOTO, ex-Steve LUKATHER). Deuxième album qui, même si le jeu unique et caractéristique du « p’tit Jimmy » nous manquera terriblement, sera bien plus enjoué et créatif que celui-ci, je l’espère de tout cœur.
Malgré tout, Heavy Crown reste un bon album, du même niveau qu’un Master Of The Moon de maître DIO, même si l’aura n’est pas aussi majestueuse et magique. Mais, il rappelle, par moments, le bon vieux temps et l’on s’imagine régulièrement ce que ce Heavy Crown aurait pu donner avec un Ronnie survitaminé derrière le micro, alternant envolées puissantes et plongées pénétrantes, hargne contrôlée et douceur spontanée. Il aurait certainement eu plus de cachet. Néanmoins, le résultat est plutôt satisfaisant pour un premier jet, ceci grâce à la collaboration de trois musiciens d’exception qui ont marqué toute une génération de metalheads il y a de cela trois décennies. Cela dit, l’ensemble aurait pu être meilleur, mais rien n’étant parfait, surtout les premiers disques, on pourra aisément leur pardonner le manque de dynamisme présent tout au long de Heavy Crown, à quelques exceptions près, celles que j’ai citées plus haut.
Peut-être que si la production, signée Jeff PILSON (FOREIGNER, T&N, ex-DOKKEN, ex-DIO), avait été plus percutante et avait sonné de manière moins actuelle, à la manière d’un Strange Highways ou, mieux encore, d’un Last In Line, ce Heavy Crown aurait pu tenir la comparaison avec l’un des derniers albums du sieur Ronnie James DIO. Ce qui aurait permis à LAST IN LINE de démarrer sur les chapeaux de roue sa carrière. Au lieu de cela, Heavy Crown se contente de divertir sans jamais nous exploser à la figure. Mais bon, nous ne pouvons pas à la fois avoir le beurre (la troupe diosienne), l’argent du beurre (l’album en question) et la crémière (l’excellence). Du moins, pas cette fois-ci...Et avec la mort de Jimmy BAIN, cela ne va pas être simple pour les membres survivants de nous proposer du matériel plus solide musicalement, si successeur à Heavy Crown il y a...Croisons juste les doigts pour que, déjà, la formation américaine reste en vie quelques années de plus, ce serait pas mal. Et puis, cerise sur la gâteau, parce-que oui nous pouvons nous permettre cette exigence de la part d’une telle coalition de légendes vivantes du rock, qu’elle puisse nous concocter, avec Phil le « newbie », un putain d’épigone qui va envoyer grave, comme Holy Diver le fit en son temps. Pour l’heure, nous pouvons uniquement apprécier ce Heavy Crown pour ce qu’il est : un démarrage flegmatique et prudent pour tâter le terrain. Mais, c’est avant tout le témoignage d’une bande de copains de longue date qui se sont amusés à graver l’instant sur support laser pour nous l’offrir sur un plateau d’argent, même s’il manque quelque peu d’âme et d’ardeur à mon humble avis. Ceci étant dit, je pense que le meilleur hommage que l’on puisse rendre à ce diablotin que fût Jimmy BAIN est de se procurer ce Heavy Crown, certes nostalgique, mais qui lorgne jovialement vers l’avenir. La couronne du roi DIO était lourde à porter, néanmoins LAST IN LINE a presque parfaitement réussi à raviver la flamme du heavy metal à la sauce Murray pour la remettre au goût du jour et, ainsi, permettre à une nouvelle ère de débuter, comme semble l’indiquer la pochette réalisée par Stan W. DECKER.
Line-up :
• Andrew FREEMAN (chant) • Vivian CAMPBELL (guitares) • Jimmy BAIN (basse – R.I.P. 2016) • Vinny APPICE (batterie) • Claude SCHNELL (claviers – limogé en 2015)
Guests & musiciens de session :
• Jeff PILSON (chœurs, mellotron)
Équipe technique : • Jeff PILSON (production, enregistrement) • Chris COLLIER (mixage, mastering) • Stan W. DECKER (artwork)
Tracklist :
1) Devil In Me 2) Martyr 3) Starmaker 4) Burn This House Down 5) I Am Revolution 6) Blame It On Me 7) In Flames (Bonus Track) 8) Already Dead 9) Curse The Day 10) Orange Glow 11) Heavy Crown 12) The Sickness 13) Heavy Crown (Bonus Track – Acoustic Remix)
Date de sortie :
• 19 février 2016
Devil In Me (clip officiel)
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