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Double éclat
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A l'origine du groupe suédois SECOND SUN, on trouve le batteur Jacob LJUNGBERG qui a d'ores et déjà usé ses baguettes dans un nombre conséquent de formations, les deux plus réputées étant ENFORCER et TRIBULATION. Aujourd'hui, notre homme se concentre sur le développement d'un projet qui combinerait son amour du Heavy Metal des premières heures (la biographie cite les débuts de JUDAS PRIEST, NAZARETH) et du Rock progressif (les noms de CAN, CAMEL et de JETHRO TULL sont avancés). Plus étrange – du moins a priori – il est question des STRANGLERS, groupe (franco)britannique ayant émergé en 1977, en même temps que la vague Punk, soit une référence à priori fort peu compatible avec l'aspect progressif [conseil gratuit du vétéran chroniqueur : l'écoute des quatre premiers albums studio du groupe me paraît salvatrice, voire indispensable, pour tout amateur de Rock teigneux et original]. Tentons d'éclaircir cette équation de prime abord impossible.
Et débutons par le plus étrange, à savoir cette évocation des STRANGLERS. Qu'est-ce qui caractérisait le son originel des étrangleurs ? Une batterie sèche, des claviers vintage, une guitare rythmique rêche et nerveuse, une basse tendue et des formats courts (plus un chant sardonique et fielleux au possible). Bingo ! Autant d'éléments que nous retrouvons dans cet album concis, dans ces compositions au format ramassé (majoritairement trois ou quatre minutes) et dans une capacité à aller à l'essentiel. Reviens avec force la question des références progressives. Je pense qu'elles ne sont pas à prendre au sens littéral mais qu'elles indiquent une volonté d'utiliser librement les formats et les textures vintage, sans limitation aucune. Par ailleurs, certaines rythmiques s'avèrent savamment tendues et mobiles, renvoyant de facto à l'un des préceptes essentiels du Prog, à savoir la complexité rythmique. Surtout, il faut remettre l'axe temporel dans le bon ordre : dès 1977, les STRANGLERS n'en faisaient qu'à leur tête et reprenaient à leur compte les sonorités bariolées du progressif pour les mettre au service d'un Rock teigneux, quoique totalement mélodique. Constat qui vaut parfaitement dans le cas de SECOND SUN. Autre point commun, l'utilisation de claviers (que l'on qualifie aujourd'hui de vintage) qui étaient des éléments constitutifs du Rock progressif, voire avant-gardiste et bruitiste (CAN), mais aussi du Hard Rock (DEEP PURPLE, URIAH HEEP).
Reste à éclaircir la mention de JUDAS PRIEST, qui vise tacitement les albums Rocka Rolla et Sad Wings Of Destiny, à la rigueur Sin After Sin. A l'époque, JUDAS PRIEST sonnait considérablement moins lourdement que son aîné de Birmingham BLACK SABBATH, mais traitait de manière relativement roide le Blues Rock à tendance progressive de SPOOKY TOOTH. Je pense que SECOND SUN est parvenu à capter l'essentiel du milieu de la décennie 70, époque durant laquelle Prog et Heavy se côtoyaient sans s'exclure.
L'intérêt de la démarche de SECOND SUN consiste à sonner de manière vintage, tout en proposant en fait une synthèse maline, car assez inédite, d'influences datées. Il serait criminel de passer sous silence une caractéristique de la musique pratiquée par SECOND SUN, à savoir le chant, en registre clair, mais surtout en suédois. On l'ignore trop souvent mais la Suède a connu durant les années 70 se développer des scènes Prog, Heavy et Folk, s'exprimant dans la langue natale. Le fait est que la musicalité de cette langue, parfois chantante, parfois rugueuse, convient parfaitement à l'univers développé par SECOND SUN.
Avis aux nostalgiques et aux iconoclastes actuels : contemplez intensément SECOND SUN et jouissez tout à la fois dans son intensité, de sa diversité, de sa délicatesse.
Vidéos de Noll Respekt cliquez ici et de Vems Fel cliquez ici
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