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Mimi katto* par le hardcore à deux voix
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Allez, ça fait longtemps que je n’ai pas balancé ici une petite chronique de hardcore. Bon, je vais être gentil avec les âmes sensibles, j’ai choisi KAMIZOL-K, un groupe lyonnais qui a poussé ses premiers cris il y a sept ans et qui a à son actif une paire de EP sortis en 2018 et 2019. Voici à présent leur nouveau méfait, Exile, habillé de sa jolie couverture façon manga - comme pour les deux premiers albums du reste et cela n’a rien d’étonnant puisque la moitié du groupe est fan du Japon.
Exile, ce sont neuf morceaux qui cochent toutes les cases du hardcore. Les paroles en vers courts sont débitées sur un flow rap screamé. Il arrive à Lionel, mais c’est rare, de passer du screamo à un mode growlé bien maitrisé. Evidemment, de temps à autre je retrouve ces chœurs scandés façon punk inscrits dans l’ADN du genre - quoi de plus naturel ? La rythmique très marquée est syncopée avec de temps en temps un petit mur de son de la batterie. Ceci dit, Anthony n’en abuse pas et c’est très bien car cela permet aux compos de garder un relief qui finit par faire défaut aux groupes de metal extrême qui en font trop. Sans compter que le groupe joue très bien sur les changements de tempo qui font basculer l’ambiance de violente à lourdingue.
Jusque là, j’ai affaire à du hardcore « normal » donc. Sauf que KAMIZOL-K se démarque avec, de la part de Gaëtan et Kevin, des riffs très heavy metal bien teintés de thrash et parfois de doom. L’intérêt des deux guitares, c’est de pouvoir marteler à l’unisson des parties très puissantes, puis de permettre à une guitare de plaquer un chorus plus mélodique ou une phrase distincte qui ajoute à leur hardcore plus de finesse. L’autre point évidemment avantageux est de bénéficier de deux chanteurs, un homme (Lionel) et une femme (Marie), ce qui multiplie les combinaisons détonantes (au sens littéral du décalage de tonalité). Je pense que sur ce point, le groupe pourrait aller encore beaucoup plus loin tant les possibilités d’accords, de synchro et de styles de chant sont infinies. Le troisième point fort de cet album est une qualité du son qui reste à la fois spontané et puissant – par moment, je kiffais tout seul en entendant la basse-Terminator de Nicolas.
Tout au long des 28 minutes, j’ai affaire à du hardcore metal bien rentre-dedans. Toutefois, aucune lassitude ne s’installe car chaque titre a son petit truc qui le différencie du précédent : des changements de rythmes, des intros cinématographiques, des breaks heavy, des refrains accrocheurs, des riffs saillants, des chorus plus mélodiques… le tout disséminé dans l’album pour relancer habilement l’attention.
Je dirais que sans révolutionner le genre, sur Exile, KAMIZOL-K trouve des moyens d’esquisser une personnalité distincte que j’espère bien voir s’affirmer dans les albums à venir.
Mais au fait, pourquoi deux voix ? « Parce que pendant que la première voix te fait lever l’oreille, la seconde la tranche à la racine avant que le bulbe ne se rétracte. Tel est l’art ancestral du mimi katto* par le hardcore à deux voix. »
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KAMIZOL-K est composé de : - Lionel, chant ; - Marie, chant ; - Gaëtan, guitare ; - Kevin, guitare ; - Nicolas, basse ; - Anthony, batterie.
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Extrait de Exile : - Get Away : Cliquez ici ! - Undo : Cliquez ici !
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(*) Mimi katto - 耳カット : Tranchage d’oreille
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